Note de synthèse
Quel rôle l’anxiété sociale joue-t-elle dans la solitude?
February 9, 2023
Adam Frost, Cindy Yu, Jocelle Refol, Pete Bombaci, Kiffer Card
Note : Le résumé ci-dessous est basé sur un article original publié en anglais.
Réduire la solitude demeure un défi, les interventions cliniques ayant souvent des effets limités. Une approche prometteuse consiste à cibler des facteurs fortement associés à la solitude et ayant un impact plausible sur celle-ci, comme l’anxiété sociale. Ce résumé explore la relation entre la solitude et l’anxiété sociale, en examinant comment ces deux phénomènes s’influencent mutuellement et les possibilités de traitement pour les atténuer.
L’anxiété sociale, définie comme la peur d’être jugé négativement ou l’inconfort dans des interactions sociales, est fréquente. Dans des cas graves, elle peut évoluer en trouble d’anxiété sociale, entraînant un évitement social et aggravant la solitude. Même une anxiété sociale modérée peut limiter l’accès à des relations sociales enrichissantes et contribuer à un sentiment d’isolement. Les données de l’Enquête canadienne sur les connexions sociales (CSCS) montrent qu’environ 86 % des répondants âgés de 16 à 80 ans ressentent un certain degré de malaise social.
De nombreuses études confirment un lien solide entre l’anxiété sociale et la solitude. Une méta-analyse a relevé une corrélation moyenne (r = 0,46) chez les enfants et adolescents, tandis que d’autres études ont trouvé des corrélations chez les adultes (r = 0,20 à 0,37). Ces résultats indiquent une relation bidirectionnelle : la solitude peut exacerber l’anxiété sociale en générant des peurs de rejet, tandis que l’anxiété sociale limite les interactions sociales, renforçant le sentiment d’isolement. Par exemple, l’évitement social, une caractéristique centrale de l’anxiété sociale, réduit les opportunités de développer des compétences sociales et des réseaux de soutien. Cela aggrave le fossé entre les relations souhaitées et réelles, ce qui est une cause clé de la solitude.
Les résultats de la CSCS corroborent ces liens : l’anxiété sociale est un prédicteur significativement plus fort de la solitude que le nombre d’amis proches déclarés. En effet, parmi les répondants, 21,9 % ont identifié l’anxiété sociale comme une barrière à la socialisation. Les analyses ont également révélé une corrélation entre l’anxiété sociale et la solitude (r = 0,37), même après ajustement pour l’âge et le revenu. En outre, bien que la solitude diminue avec l’âge, cet effet disparaît après contrôle de l’anxiété sociale, suggérant que cette dernière pourrait diminuer avec le temps.
Sur le plan clinique, des traitements efficaces pour l’anxiété sociale, tels que les thérapies cognitivo-comportementales (TCC), ont également montré des effets positifs sur la solitude. De même, les programmes de TCC ciblant la solitude présentent des similarités notables avec ceux conçus pour traiter l’anxiété sociale, renforçant l’idée d’une relation causale entre ces deux dimensions.
Cependant, l’anxiété sociale et la solitude sont des concepts distincts. Certaines personnes peuvent être solitaires sans éprouver d’anxiété sociale, tandis que d’autres peuvent se sentir connectées malgré une forte anxiété sociale. Ainsi, les interventions doivent être adaptées aux besoins individuels. De plus, des recherches supplémentaires sont nécessaires pour clarifier les mécanismes de causalité et optimiser les traitements qui ciblent ces deux facteurs.
En conclusion, nous recommandons de rendre les ressources de traitement pour l’anxiété sociale largement accessibles afin de surmonter les barrières internes à la connexion sociale. Les investissements dans la recherche sont essentiels pour approfondir la compréhension des liens entre l’anxiété sociale et la solitude, et pour développer des interventions adaptées tout au long de la vie. En intégrant ces deux dimensions dans les approches de soutien, il est possible de promouvoir la santé sociale au sein de la population canadienne.