Note de synthèse
La solitude est-elle un problème social?
June 26, 2024
Kiffer Card
Note : Le résumé ci-dessous est basé sur un article original publié en anglais.
La solitude, longtemps perçue comme un problème individuel ou psychologique, est désormais reconnue comme un phénomène complexe influencé par des facteurs biologiques, sociaux et culturels. Les recherches montrent que la solitude est liée à des prédispositions génétiques et à des processus biologiques ayant des racines évolutives, mais également à des structures sociales et culturelles modernes qui ne répondent plus aux besoins sociaux fondamentaux de l’humain. En effet, la solitude semble être exacerbée par des facteurs comme l'urbanisation, l'individualisme, le néolibéralisme, le matérialisme et la technocentrisme, qui fragilisent les liens sociaux et augmentent les sentiments d'isolement.
Les études historiques et sociologiques indiquent que les transformations sociales survenues depuis la révolution industrielle, notamment le passage des communautés rurales aux sociétés urbaines, ont progressivement désorganisé les réseaux sociaux traditionnels. Par ailleurs, des valeurs culturelles comme l’autonomie individuelle et la compétitivité ont favorisé l’émergence de normes antisociales, réduisant la confiance interpersonnelle et la cohésion sociale. Ces dynamiques sont aggravées par des technologies numériques, qui, bien qu’elles facilitent des interactions superficielles, ne remplacent pas les connexions en personne nécessaires à un véritable épanouissement social. Ces changements structurels, combinés à des inégalités économiques et à l’effritement des institutions communautaires comme les groupes religieux ou sociaux, créent un environnement social où les individus se sentent plus isolés, malgré un contact fréquent avec les autres.
Outre ses causes, la solitude elle-même a des impacts délétères sur la société. Elle agit comme un cercle vicieux en renforçant des comportements asociaux ou antisociaux, en diminuant la confiance sociale et en alimentant des idéologies polarisantes ou extrémistes qui comblent les besoins non satisfaits d'appartenance et de sens. Par exemple, les personnes solitaires adoptent souvent des stratégies sociales évitantes et pessimistes, ce qui peut isoler davantage leurs réseaux sociaux et influencer négativement les normes collectives de sociabilité.
Les données de l’Enquête canadienne sur la connexion sociale révèlent des différences géographiques marquées dans les niveaux de solitude émotionnelle et sociale, avec des variations significatives observées entre provinces, zones géographiques locales et villes. Ces différences suggèrent que des facteurs régionaux, comme les politiques sociales et culturelles, jouent un rôle majeur dans l’atténuation ou l’aggravation de la solitude. Cependant, la solitude sociale semble davantage influencée par des réseaux personnels et des interactions communautaires immédiates.
En conclusion, la solitude est un problème multidimensionnel qui nécessite des réponses intégrées combinant des soutiens psychologiques, des initiatives d’intégration sociale et des réformes culturelles et structurelles. Les interventions devraient s’attaquer aux causes systémiques de la solitude, y compris les inégalités sociales, les hiérarchies malsaines et la perte de confiance sociale. En adoptant une approche collective pour renforcer la cohésion sociale et promouvoir des environnements inclusifs et solidaires, les communautés peuvent non seulement réduire la solitude, mais aussi favoriser un bien-être collectif durable.